Ce chapitre se propose d'analyser les justifications théoriques de la participation des salariés à la gestion des entreprises à la lumière de certaines tendances de la philosophie morale et politique contemporaine. Ce sont d’abord l'approche des capacités d’Amartya Sen et le néo-républicanisme de Philip Pettit qui confèrent une nouvelle légitimité au concept de codétermination : comme expression pour la première d'une capacité typiquement habilitante, pour la seconde d’une non-domination sur les lieux de travail. Mais c’est surtout le concept de « liberté sociale », emprunté à Axel Honneth, qui va le plus loin, en nous permettant de montrer comment seule la participation des salariés au management rend compatible la subordination juridique du contrat de travail avec une nouvelle conception de la liberté : au lieu de se réduire à la liberté contractuelle, elle implique que les travailleurs disposent d’un droit de codécision sur le contenu, l’organisation et les orientations du travail salarié. Les deux piliers de la codétermination (conseils d’administration et d’établissement) deviennent des dispositifs de « reconnaissance mutuelle », et l’entreprise apparaît comme l’institution économique de la liberté sociale. En tant que nouvelle liberté, la codétermination autorise une relecture juridique et historique du projet européen : une « entreprise » de constitution d’une démocratie politique où les droits de codécision des salariés en entreprise accèdent au statut de droits fondamentaux individuels sociaux. La codétermination fait d’ores et déjà partie du socle normatif liant les pays membres de l’Union Européenne.

La codétermination et l'Europe de la liberté sociale

Adalberto Perulli
2024-01-01

Abstract

Ce chapitre se propose d'analyser les justifications théoriques de la participation des salariés à la gestion des entreprises à la lumière de certaines tendances de la philosophie morale et politique contemporaine. Ce sont d’abord l'approche des capacités d’Amartya Sen et le néo-républicanisme de Philip Pettit qui confèrent une nouvelle légitimité au concept de codétermination : comme expression pour la première d'une capacité typiquement habilitante, pour la seconde d’une non-domination sur les lieux de travail. Mais c’est surtout le concept de « liberté sociale », emprunté à Axel Honneth, qui va le plus loin, en nous permettant de montrer comment seule la participation des salariés au management rend compatible la subordination juridique du contrat de travail avec une nouvelle conception de la liberté : au lieu de se réduire à la liberté contractuelle, elle implique que les travailleurs disposent d’un droit de codécision sur le contenu, l’organisation et les orientations du travail salarié. Les deux piliers de la codétermination (conseils d’administration et d’établissement) deviennent des dispositifs de « reconnaissance mutuelle », et l’entreprise apparaît comme l’institution économique de la liberté sociale. En tant que nouvelle liberté, la codétermination autorise une relecture juridique et historique du projet européen : une « entreprise » de constitution d’une démocratie politique où les droits de codécision des salariés en entreprise accèdent au statut de droits fondamentaux individuels sociaux. La codétermination fait d’ores et déjà partie du socle normatif liant les pays membres de l’Union Européenne.
2024
Traité de Codétermination
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